De la nécessité d'épargner selon Charles de Ribbe
« Telles familles, telle société ».
Constatant en cette fin de XIXe la décomposition de la société française (oui… déjà), Charles de Ribbe (1827-1899) voulut se pencher sur les remèdes possibles pour enrayer cette décadence. Il nous livre ses conclusions dans son livre La Famille et la cité du XVe au XVIIIe siècle. Sans surprise, il constate que la prospérité des nations repose entièrement sur le socle de familles solides et unies. Énumérant les valeurs nécessaires à leur constitution, l’auteur nous entretient bien sûr sur le sens de Dieu et la pratique religieuse, sur l’amour de la patrie, le respect des anciens, le travail et le devoir d’état. Dans le 8e et dernier chapitre de son livre, l’auteur souligne également, aspect sans doute moins connu, la nécessité de l’épargne. L’épargne, nous dit-il, doit être le fondement de la vie économique au même titre que l’éducation est le fondement de la vie morale. Sans éducation, le foyer se détruit moralement ; sans épargne, il se détruit matériellement.
Qu’on soit riche ou pauvre, avec des revenus importants ou modestes, le principe de l’épargne revêt un caractère fondamental dans la constitution et la continuité des familles. C’est par l’épargne en effet, que le capital se constitue et se reconstitue malgré les aléas de la vie et que l’on transmet à la génération suivante.
Avec de nombreux enfants et des revenus souvent modestes, nos ancêtres fondèrent pourtant nombre de « bonnes maisons » comme on disait alors. Beaucoup de familles ont par la suite été dissoutes et dispersées pour avoir dissipé et réduit en fumée le bien que les générations précédentes leur avaient légué.
L’épargne possède également une valeur éducative profonde. L’idée de l’épargne reflète en effet l’idée du devoir sans laquelle il n’y a pas de foyers stables et prospères. Loin du luxe superflu et loin de toute dépense inutile, les parents, en épargnant, éduquent leur descendance en leur montrant l’exemple d’une vie sobre et modeste.
Les familles vouées au travail et qui ne détournent pas le fruit de ce travail dans la recherche de vains plaisirs, sont donc le garant de la stabilité et de la prospérité des États. Prions le Ciel que nos gouvernants connaissent et fassent leur cette phrase profonde de Charles de Ribbe : « Une nation marche à la décadence lorsque, au lieu de fonder son régime sur les bonnes mœurs de ces familles, elle subordonne son droit privé et public aux exigences des familles oisives qui lui imposent leur désorganisation ».