Et pour nos enfants ?
Ce qui est vrai de l’ordre général l’est aussi de celui rapporté à l’éducation des enfants. On retrouve finalement là, le «bâton» et la «carotte». Le bâton, c’est la punition qui heurte et crée un sentiment de répulsion ; la carotte, la récompense qui vient susciter la satisfaction et sa recherche.
Le bâton - La punition
Il est de la responsabilité des parents de punir leurs enfants avec prudence. Le but de la punition est évidemment de faire progresser l’enfant et non de soulager les nerfs des parents. Elle doit être adaptée à chaque enfant et en vue de son seul bien.
Pour résumer, une bonne punition est un acte sensible (privation, réparation, corvée) qui va créer chez l’enfant une sensation désagréable en lien avec un acte répréhensible commis. Ce qui est visé, ce n’est pas l’acte en lui-même, mais l’idée génératrice de l’acte. Par exemple, un enfant mû par l’envie, va voler le jouet de son frère. L’idée mauvaise est l’envie, l’acte mauvais est le vol. La punition, adaptée aux particularités de l’enfant, devra lui permettre non seulement de «sentir» que voler c’est mal, mais aussi que «envier» est mal. Notons enfin que s’il n’y a pas punition, l’enfant peut ne pas comprendre que son acte est mauvais, et au-delà, qu’envier n’est pas si répréhensible.
Concrètement :
Instantanéité de la punition : pour les petits enfants qui oublient très vite les choses, s’il faut punir, il faut punir tout de suite et sans attendre, pour être certain d’imprimer chez l’enfant le sentiment de répulsion en lien avec l’acte et l’idée qu’on veut condamner. Il est très recommandé de ne pas le faire plus tard, même si on n’a pas pu le faire en l’instant, car cela produit de mauvaises associations (« Je n’ai rien fait mais je suis puni quand même ») et crée inévitablement un sentiment d’injustice très compréhensible chez l’enfant.
Expliquer la punition : dès que l’enfant sait parler, et surtout dès l’âge de raison, il ne faut jamais punir un enfant sans lui dire pourquoi. «Je te punis parce que tu as menti». Ces explications sont essentielles pour associer, encore une fois, l’idée répréhensible à l’état affectif désagréable.
Punition psychologique : plus l’enfant grandit, moins la punition a besoin d’être corporelle, plus elle peut être psychologique. Par exemple, on peut se contenter de gronder un enfant avec des mots pour créer chez lui un sentiment et l’associer ensuite à l’acte commis.
Punition contre-productive : il est primordial que les punitions soient adaptées à l’enfant. Par exemple, que les mots ne dépassent pas la pensée : «tu nous pourris la vie», «tu es stupide, tu ne comprends rien» sont des mots malheureux parfois difficiles à rattraper ! Un seul mot d’ordre : toujours agir avec prudence, calme et pondération.
La carotte - La récompense
La récompense obéit aux mêmes lois que la punition. Elle a pour but d’associer des sentiments favorables avec une idée ou une valeur qu’on veut enseigner. Comme la punition, les parents doivent faire preuve de prudence dans le choix des récompenses, pour être certains de leurs effets.
Concrètement ?
La récompense matérielle : très efficace mais doit être utilisée avec parcimonie. Il s’agit de donner quelque chose (un bonbon, un peu d’argent de poche, un cadeau, etc.) à l’enfant lorsqu’il a accompli quelque chose de bien, dans le but de susciter un sentiment de satisfaction qui vient s’associer à l’acte accompli. Attention qu’elle ne soit pas systématique et que l’enfant ne fasse finalement plus que des actes bons dans le but d’être récompensé. Mais pour souligner un acte précis, elle peut s’avérer très utile, lorsque l’enfant s’est dépassé, a pris sur lui. Ainsi, par exemple, un enfant obtient la médaille d’honneur à l’école, on peut alors lui offrir un petit quelque chose pour rendre sensible ce moment qui restera ainsi gravé dans la mémoire.
«Merci», «Bravo», «Je suis fier de toi» : la reconnaissance et l’encouragement sont des récompenses profondes utilisables fréquemment. Même lorsque l’enfant ne fait finalement que son devoir, il faut savoir le remercier, l’encourager, et plus encore, lorsque l’enfant a pris sur lui pour accomplir quelque chose difficile, il est bon de lui témoigner une fierté légitime.
L’environnement
Le cadre de vie est essentiel à la construction de la volonté : comment la forger quand l’entourage passe tout son temps sur les écrans et si le bruit est permanent (musique, tv etc.) ?
L’exemple des parents : bien évidemment, il s’agit là du plus important. Comment vouloir que les enfants aient des activités éducatives et utiles si les parents passent leur temps sur les téléphones portables dans le canapé ? Comment vouloir apprendre la patience et la persévérance aux enfants si le premier obstacle suscite l’énervement et l’abandon ? Dans la même veine, il est évident que les fréquentations amicales méritent d’être choisies avec la plus grande attention.
L’examen de conscience le soir : il s’agit là de l’apprentissage de la méditation ! Par quelques paroles simples, les parents peuvent dresser un tableau de méditation et suggérer une résolution. «Aujourd’hui c’est dimanche, ce matin à la messe, monsieur l’abbé avait les ornements violets, car nous sommes en carême. Le violet, c’est une couleur triste qui symbolise la pénitence. Les petits sacrifices que nous faisons vont consoler le cœur de Jésus qui est mort sur la croix en souffrant pour nous : choisissons chacun un sacrifice».
Capter les sentiments favorables des enfants : les enfants sont spontanés et vont souvent faire état de leurs sentiments. Il faut capter ces sentiments lorsqu’ils sont favorables. Par exemple, si un enfant dit : «comme ce gâteau est bon !», on pourra lui répondre : «Oui, tu as raison, il est très bon, il faut bien remercier maman qui l’a fait tout à l’heure pour régaler toute la maison». On met en valeur la reconnaissance. Ou si l’un se plaint : «C’est fatigant de marcher», on peut l’encourager «Oui, un peu, c’est vrai, mais tu vas voir, quand tu seras arrivé là-haut, tu seras fier de toi. Tu verras comme la voiture est petite, vue d’en-haut. Et puis, tu n’es pas en sucre, n’est-ce pas ? ». On met en valeur le goût de l’effort et la confiance en soi.
Aller au bout des choses : lorsqu’un enfant commence une activité, il faut le forcer à la terminer. Quitte à laisser l’activité quelque temps et y revenir le lendemain. Le but est que l’enfant comprenne que la satisfaction d’avoir terminé quelque chose vaut plus que tous les petits obstacles.
Le sentimentalisme : attention à la sensiblerie et au sentimentalisme. La plaie de notre époque est que les hommes ne réfléchissent plus : ils ressentent. Pour cela, il faut apprendre à nos enfants à dominer leurs sentiments et à ne pas s’abreuver de bouillie sentimentale : pas de musique lancinante, de livre à l’eau de rose, de film romantique, surtout à l’adolescence. Mais au contraire, de bonnes lectures, vivantes et réelles, de bons films et de belles musiques. Dans le même ordre, les parents doivent réfléchir en adultes sur la conduite à tenir, au lieu d’envisager les situations du seul point de vue du ressenti de l’enfant : ce défaut, s’il se comprend, est trop répandu pour ne pas être souligné.
Bannir le confort superflu : le confort est un piège qui tiédit les volontés. Comment faire preuve de volonté quand les maisons sont si bien chauffées ? Alors qu’on a des voitures tout équipées, des trottinettes électriques, des escalators et des ascenseurs ? Alors qu’on mange ce que l’on veut ? Qu’on a des canapés si moelleux ? Alors que nos vêtements sont si doux ? L’eau de la douche si chaude ? Pour les enfants, ce confort tue dans l’œuf tout goût de l’effort. Comment compenser ? En supprimant le confort superflu : 19°C, ça suffit pour dormir, 23°C c’est trop… Pas besoin d’une eau trop chaude pour le bain. Remplaçons les écrans par les livres, constituons-nous des bibliothèques. Faisons des promenades en famille. Laissons les genoux des petits garçons se piquer aux petits froids d’hiver : un bermuda ne les tuera pas. Lorsqu’un enfant tombe sans réel mal, ne nous précipitons pas pour le relever, mais encourageons-le à le faire tout seul. Ne pas gaver les enfants de jeux et de sorties de manière qu’à dix ans ils ne soient plus capables de s’émerveiller, ayant déjà tout vu et tout essayé. Impliquons nos enfants dans le service à la maison : le couvert, le ménage, les corvées de bois, les poubelles. Enfin, n’hésitons pas à laisser pleurer un bébé lorsque ce n’est pas encore l’heure du biberon.
Les repas : la nourriture est un symbole chrétien très fort. Elle doit donc s’entourer de rites dans lesquels l’enfant apprend à dominer ses instincts les plus primaires. Un bébé pleure lorsqu’il voit le biberon arriver : en grandissant, l’enfant apprendra à présenter le plat à son voisin avant de se servir. Enfin, à table, on apprend à manger de tout. L’enfant goûte ce qui est servi et finit son assiette : s’il ne termine pas au déjeuner, il le fera au goûter. En général, l’apprentissage est rapide.
Le scoutisme : en tant que tel, une vraie école de vie. Il faut s’y dépasser, accorder sa confiance et mériter celle des autres, pardonner et soutenir, se débrouiller et bricoler, obéir et commander, ordonner sa volonté au bien commun de la patrouille et de la troupe. Fortifiant le courage, le scoutisme permet d’associer de grands élans à l’idéal qui y est proposé. A douze ans, partir trois semaines avec le souvenir de la maison enfoui au fond de son sac à dos, pour couper des arbres, dormir dans la forêt, défendre son fortin, marcher de nuit, de jour, sous le soleil ou la pluie pendant des kilomètres, au milieu d’autres garçons et sous les ordres de chefs qui n’ont pas la douceur de maman, il faut être courageux. Mais quel sentiment au retour du camp ? L’estime de sa patrouille, la fierté de ses chefs, l’écho des chants devant le feu, les prières clamées face au ciel et l’immense sentiment d’avoir «grandi». Cela forge un homme ! Sachant toutefois que cette pédagogie n’est pas nécessairement adaptée à tous et qu’elle ne se comprend que policée par la foi catholique qui l’épure de toute tentation naturaliste.