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Voyage du pape au Kazakhstan

Dialogue inter-religieux et allégeance aux principes de l’ONU

Du 13 au 15 septembre 2022, le pape François était en voyage au Kazakhstan pour participer au VIIe Congrès des leaders des religions mondiales et traditionnelles à Noursoultan (Astana1). Un signe d’allégeance à l’ONU et une insulte envers Notre-Seigneur Jésus-Christ.

Astana

Le Kazakhstan, un modèle pour la paix ?

Le Congrès des leaders des religions mondiales et traditionnelles a été fondé en 2003 par Noursoultan Nazarbaïev, alors président du Kazakhstan. Premier secrétaire du Parti communiste du pays au moment de la chute de l’URSS en 1991, Noursoultan gardera le pouvoir «démocratiquement» jusqu’en 2019 au cours de cinq mandats successifs qui le verront toujours élu avec près de 95 % des suffrages.

Régulièrement critiqué dans le monde occidental pour son culte de la personnalité, la généralisation de la corruption dans le pays et son contrôle total de toute opposition, il gardera toujours de bonnes relations avec la Russie, la Chine et les États-Unis grâce au commerce des ressources naturelles du pays. Son opposition à l’armement nucléaire et son engagement pour le dialogue inter-religieux suffit au pape François pour le donner en exemple aux artisans de paix. Son successeur, Kassym-Jomart Tokaïev, est issu de son parti politique «Nour-Otan».

Le Congrès des leaders des religions mondiales et traditionnelles à Astana

Le Kazakhstan compte 19 millions d’habitants pour pas moins de 27 ethnies. La majorité est musulmane (70 %), et une grosse partie est chrétienne, majoritairement orthodoxe (26 %). Le pays ne compte pas plus de 1 % de catholiques et possède aussi de grosses communautés bouddhiste et juive. Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, la montée des extrémismes religieux préoccupe particulièrement Noursoultan. S’inspirant de plusieurs initiatives de coopérations inter-religieuses, dont les rencontres d’Assise2, il fonde en 2003 le Congrès des leaders des religions mondiales et traditionnelles pour le développement d’une culture de la tolérance et faire contrepoids à l’idéologie de la haine et de l’extrémisme. Doublé d’un secrétariat permanent, le congrès est présidé par le chef de l’État et a lieu tous les trois ans à Astana. Il s’agit d’une véritable institution internationale, interconfessionnelle et permanente pour le dialogue des religions. L’objectif est de trouver des repères humains communs dans les formes mondiales et traditionnelles des religions et de prendre des décisions concertées pour promouvoir la paix et la tolérance. Au fil des années le Congrès devient un rendez-vous incontournable. De 17 délégations en 2003, il passe à 100 délégations de plus de 50 pays différents en 2022. L’Église catholique a toujours été représentée par des cardinaux mais cette fois, malgré ses problèmes de santé et ses difficultés à se déplacer, le pape François a tenu à faire le déplacement lui-même.

Dans le sillage de l’ONU

Le Congrès et son secrétariat permanent se posent en collaborateurs de toute organisation internationale visant à promouvoir le dialogue entre les religions, les cultures et les civilisations, L’ONU en premier lieu. Cette dernière a d’ailleurs régulièrement envoyé une délégation au Congrès et encourage l’initiative qui respecte en tout point ses normes et va dans le sens de son groupe de travail inter-agences sur la religion et le développement durable. Noursoultan n’a d’ailleurs pas fait dans la demi-mesure pour loger le congrès et sceller dans l’acier et le verre son allégeance à l’ONU. Le Palais de la paix et de la réconciliation, pyramide de 62 m de côté pour 62 m de haut, spécialement dédiée à l’événement, a coûté 58 millions d’euros et a été inauguré en 2006. Elle contient quatre lieux de culte (musulman, chrétien, bouddhiste et judaïque) et sa salle circulaire est bâtie sur le modèle de la salle du Conseil de sécurité des Nations unies à New-York.

La religion des droits de l’homme

La participation du pape François à ce congrès est terrifiante, même si elle était parfaitement prévisible, puisqu’en droite ligne avec la pensée personnelle du souverain pontife et de ses prédécesseurs depuis le concile Vatican II. En participant à ce congrès, le pape a placé officiellement et publiquement la religion catholique sur le même pied d’égalité que toutes les religions du monde. Il l’a réduite avec toutes les autres au service d’une cause purement humaine, faisant des droits de l’Homme, de la paix et de la fraternité, des valeurs transcendantales. C’était pour cette raison déjà que Léon XIII avait interdit à tout catholique de participer à un parlement des religions, organisé en 1893.

Le Congrès n’a produit qu’une déclaration commune relativement fade mais un point en particulier mérite d’être cité : «La diversité religieuse est permise par Dieu et, par conséquent, toute coercition envers une religion et une doctrine religieuse particulières est inacceptable.» Rappelons que le Congrès n’est pas convoqué par un leader religieux en particulier mais par un chef d’État, et qu’aucune religion n’y est mise en avant plus qu’une autre. Le mot «permise» doit être attribué de manière positive à chaque religion de la même manière, y compris à la religion catholique. Autrement dit, toutes les religions sont voulues par Dieu au même degré et toutes doivent participer à la concorde générale. Le document est signé de tous les participants, y compris du pape François. Un grave désaveu pour saint Pierre, qui affirmait en parlant de Notre-Seigneur Jésus-Christ : «Il n’y a de salut en aucun autre ; car nul autre nom n’a été donné sous le Ciel aux hommes, par lequel nous devions être sauvés»3.

Une voix dans la steppe

Aujourd’hui l’œcuménisme et la liberté religieuse semblent des acquis incontournables de Vatican II. Pourtant certaines voix s’élèvent pour en rappeler de temps à autre les dérives. Mgr Athanasius Schneider, déjà connu pour son franc-parler et ses positions conservatrices, s’est exprimé à ce sujet. S’il reste prudent dans l’ensemble du discours, l’essentiel est dit et mérite d’être cité : «une telle réunion, où toutes les religions sont considérées comme égales, donne l’impression d’une sorte de supermarché des religions. Pourtant, la religion catholique est la seule vraie religion voulue par Dieu et il n’y a pas d’autre religion qui plaise à Dieu, que la Foi en Son Fils Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme et le seul Sauveur de l’humanité toute entière. Les rencontres inter-religieuses telles qu’elles se réalisent de nos jours, sinon théoriquement, mais sûrement pratiquement, mettent Jésus-Christ au niveau de l’une des autres figures religieuses des religions mondiales. Cela sape la mission même de l’Église, qui doit enseigner toutes les nations afin qu’elles viennent à Jésus-Christ, leur Sauveur»4. Et monseigneur Schneider sait de quoi il parle, lui qui est évêque auxiliaire… d’Astana au Kazakhstan.

 

1. Astana, capitale du Kazakhstan, a été rebaptisée Noursoultan dès la démission du président Noursoultan Nazarbaïev en 2019, ce dernier restant président de son parti ultra majoritaire «Nour-Otan». Après de graves troubles dans le pays en janvier 2022, Noursoultan se retire de la vie politique et dès le 16 septembre 2022 Noursoultan redevient Astana.
2. Journée de rencontre inter-religieuse organisée à Assise par Jean-Paul II en 1986, pour participer à l’année internationale de la paix proclamée par l’ONU. La rencontre sera renouvelée en 1993 et 2002 par Jean-Paul II, puis plus tard en 2011 par Benoît XVI et en 2016 par François.
3. Actes des Apôtres IV-12.
4. Mgr Schneider interrogé par Jean-Marie Guénois, spécialiste des questions religieuses internationales au Figaro (15 septembre 2022).